jeudi 2 avril 2009

LE JUDO FÉMININ


De nos jours, la plupart des activités masculines, sont de plus en plus partagées par les femmes. Et le sport en particulier, est l'une de ces activités la plus en vogue parmi elles. La propagation intense et intelligente des règles d'hygiène de vie, des principes de culture physique et de vie au grand air, ont, au cours de ces dernières années, démontré les bienfaits corporels et moraux dont on peut bénéficier par la pratique des sports.

Quelle est la femme « moderne» qui ne pratique un ou plusieurs sports? La pratique sportive est définitivement entrée dans les mœurs, tant masculines que féminines. Certaines activités physiques sont plus féminines que d'autres. Par exemple, la danse classique, le patinage ou la natation. Certains sports sont par contre peu indiqués ou tout à fait nuisibles à la morphologie et à la psychologie féminine: la boxe, l'haltérophile, le rugby, etc.

En est-il· de même du judo? Le fait que des milliers de jeunes filles et femmes le pratiquent à travers le monde est-il une raison suffisante pour l'indiquer comme sport féminin?

Qu'attend une femme du sport en général?

Qu'attend-elle du judo en particulier?

Le judo complet de l'athlète masculin est-il identique al féminin? A la première de ces questions, il peut être répondu brièvement que la femme attend du sport un exercice attrayant lui permettant d'acquérir un corps souple, résistant et harmonieusement développé. En conséquence, elle en espère une plus grande vitalité, une meilleure résistance aux maladies, bref une « forme» et une santé parfaite. D'autres qualités sont consciemment ou inconsciemment désirées: une plus grande maîtrise de soi, une plus grande aisance physique et morale, une volonté forte, etc ...

A la seconde question, il est plus difficile de répondre, car bien souvent la femme ne pense pas spontanément au judo. Seul l'exemple d'autres femmes pratiquant le judo l'incite à se poser des questions. Que recherche-t-elle alors? Bien souvent une gymnastique harmonieuse, développant et assouplissant tous les muscles, tout en lui donnant une arme incomparable de self défense. Acquérir ou conserver une taille fine, une démarche alerte tout en apprenant un redoutable moyen de se défendre. n'est-ce pas là une aventure tentante? Bien souvent notre aspirant judoka veut plus. Elle espère devenir maîtresse de ses nerfs. acquérir des réflexes fulgurants, être calme en toute circonstance en agissant avec sûreté, rapidité et fermeté, ne pas se lais intimider par qui que ce soit, diriger ses moindres actes avec volonté, assurance, mais aussi avec souplesse. Bref gagner bien des qualités sans perdre sa féminité.'

Mais que deviendra la personnalité féminine, que deviendront ces corps fragiles sous l'entraînement rude des judokas? Sans entrer dans des détails de physiologie et de psychologie, il est facile de comprendre que le judo féminin est et doit être différent du judo masculin.

Il ne pourra en aucun cas employer des exercices où la force physique et l'énergie nerveuse sont trop importantes. L'athlétisme est ouvert aux sportives, mais il ne viendrait jamais à l'idée de personne d'entraîner des femmes au marathon!

Comment le judo féminin évolua-t-il au Japon avant de s'introduire chez nous? Maître Jigoro Kano ne pensa pas, au début de ses premiers cours, à enseigner le judo aux femmes. Mais peu à peu ses hautes conceptions philosophiques sur son art l'amenèrent à considérer que certaines femmes pourraient en tirer les mêmes bienfaits que les hommes. Aussi commença-t-il à enseigner les prémices du judo à sa sœur ai née. Certains pionniers le pratiquèrent avec leur épouse, tel maître Yamashita qui en fit quelques démonstrations aux Etats-Unis dès 1903. A cette époque quelques femmes déjà pratiquaient le judo au Kodokan,. mais maître Kano hésitait encore à admettre que cette étude leur fut profitable. Son manque d'expérience l'incitait à la prudence. Mais la réussite de ces quelques premières tentatives 1 incita, en 1934, à créer un cours féminin officiel. Ce furent les maîtres Honda et Uzawa qui se chargèrent de l'enseignement. Ils continuèrent à enseigner selon les principes de maître Kano, c'est-à-dire en évitant les compétitions et en insistant sur certains katas. Peu à peu, l'enseignement féminin se perfectionna et certains éléments féminins devinrent à leur tour professeurs. Actuellement le judo féminin compte de nombreuses ceintures noires, dont certaines de très haut grade, jusqu'au 7e dan.



Comment se pratique le judo féminin au Japon

La tenue vestimentaire est semblable à celle des hommes, saut au Kodokan où le bas du pantalon est plus resserré que celui des hommes. Les ceintures sont coupées longitudinalement de fines bandes centrales de couleur' blanche. Ceci distingue les grades féminins des grades masculins. Il est évident qu'une ceinture noire 3e dan féminine n'équivaut pas un 3e dan masculin.

L'étude des brise-chutes est particulièrement approfondie, ainsi que toutes les formes d'attitudes, démarches et rituels. Le randori sérieux et le shiai sont évités. Mais la pratique des katas est très intense. Les principaux sont : taiku-no-kata, fyoshi-yogoshin-no-kata et ju-no-kata. Quant aux classiques nage-no-kata et katame-no-kata, ils sont généralement étudiés par après. Mais ceci dépend d'un professeur à l'autre. Dans l'étude des katas et ensuite dans la pratique du yaku-soku-geiko, les instructeurs insistent énormément sur la correction des attitudes, la décontraction et l'esprit de décision. Un autre facteur important est la souplesse et l'harmonie que doivent dégager tous les actes d'un entraînement quel qu'il soit.

L'enseignement est prodigué au Kodokan par des instructeurs féminins et certains maîtres masculins. Mais dans la plupart des dojos les cours sont dirigés par des professeurs masculins .

Il en est de même dans les lycées et à l'université, où encore trop peu de professeurs féminins diffusent leur enseignement. Il va sans dire que la plupart des judokas japonaises préfèrent des professeurs féminins et surtout un cours collectif exclusivement. féminin .. Nos femmes ont les mêmes desiderata mais les professeurs sont trop peu nombreux et les cours mixtes sont encore majoritaires. S'il est recommandé à un élément féminin de s'entraîner de temps à autre avec un partenaire masculin, il est évident qu'une pratique exclusive avec des hommes, va à l'encontre dès buts recherchés. Immanquablement, la femme risque de se viriliser, de se blesser ou plus simplement de se détourner du judo.

Quelles sont les conditions idéales pour pratiquer le judo?

cours exclusivement féminin, avec un entraînement hebdomadaire mixte composé de judokas masculins choisis;

direction féminine de l'enseignement, supervisée par un maître masculin;

préparation physique appropriée à la – morphologie féminine (gymnastique spéciale);

étude des katas sans chutes pendant les premiers mois (ju-no- kata et taïku-komin-no-kata;

étude séparée et approfondie des brise-chutes;

initiation aux techniques de projections et contrôle par les nage-no-kata et katame-no-kata;

entraînement au yaku-soku-geiko;

à partir de la ceinture marron, pratique du randori;

mon dos fréquents axés sur la souplesse et l'harmonie des techniques judo ainsi que sur le meilleur emploi de l'énergie. les katas seront, au début, décomposés dans leurs moindres détails et les élèves assimileront très tôt les notions ce tsukuri, kuzushi et kake. Peu à peu, lorsque les mouvements sont bien appris et qu'ils peuvent s'enchaîner sans hésitation, le kake devra se dérouler sans arrêt, du début à la fin, avec un minimum d'efficacité. Chaque attaque, chaque défense, doit être sincère, rapide et énergique. l'action la plus authentique possible sera le but à atteindre, sans perdre de vue la correction et l'harmonie des mouvements.

Quant au yaku-soku-geiko et aux randoris, ils seront l'aboutissement d'un entraînement bien compris. Il s'agira de combattre avec un maximum de correction, d'élégance et d'efficacité. Jamais le yaku, ou à plus forte raison le randori, ne devra dégénérer en bagarre. Par son physique et par sa psychologie, la femme est, plus que l'homme, amenée à utiliser au maximum le principe du meilleur emploi de l'énergie. Et bien souvent son manque de puissance musculaire l'incite à découvrir la voie souple, plus rapidement que le judoka masculin.




Quelques cas spéciaux

On fait de plus en plus appel à certains groupes féminins la surveillance, la police ou même les forces armées. Ils s'est donc avéré nécessaire d'instruire ces groupes aux techniques du judo et en particulier à la self-défense. D'autres professions telles que garde-malades dans les asiles, caissière, etc …nécessitent également une arme défensive. Pour la plupart des cas, l'entraînement au judo est excellent, ne serait-ce que pour la formation des réflexes et de l'esprit de décision. Mais s'agira souvent de combattre des hommes, l'entraînement doit être plus intense et plus spécialisé que celui du judo féminin courant. Les éléments féminins de ces formations spéciales seront des femmes au physique et au moral peu courants. L'entraînement de base sera identique à celui des autres femmes, pour ensuite tendre vers l'entraînement masculin. Toute une longue progression est nécessaire pour amener ces femmes à une efficacité aussi redoutable que celle des hommes.

Une gymnastique de résistance sera spécialement adaptée à leur cas et la pratique du kime-no-kata sera fréquente. De plus l'entraînement mixte sera continuel après la période d'initiation.

Conclusion

Hormis les cas spéciaux cités ci-dessus, le judo doit être entièrement réétudié pour des éléments féminins. Une pratique bien adaptée du judo féminin leur sera alors bénéfique sous bien des plans. Cet entraînement se fera sous contrôle médical, comme pour l'homme. Sa pratique courante ne comporte aucun risque et l'on peut assurer les futures mères qu'aucune suite fâcheuse n'est à craindre pour leur progéniture. Bien des 3e ou 4e dan japonaises sont mères de plusieurs enfants. Celles-ci estiment même que le judo leur a permis d'élever plus sainement leurs enfants, sur le plan physique comme sur le plan moral.

Une mère équilibrée, saine, forte moralement et physiquement, élève ses enfants dans un climat sain et tonique. Le judo permet en effet d'entraîner toute la musculature, fortifie le cœur et les poumons et accroît la résistance nerveuse. Il pourra surtout aider la femme à surmonter la peur et l'angoisse. La maîtrise graduelle du principe du meilleur emploi de l'énergie lui donnera, dans la vie, des possibilités d'efficacité lui permettant d'éviter énervement, fatigue et dépression. La femme tirera du judo le maximum de bienfaits ou de déboires selon que celui-ci sera parfaitement adapté ou non.