J'ai, jusqu'à présent, peu parlé de l'entraînement de la femme en judo; j'y consacre un chapitre dans la troisième partie de' ce volume. En ce qui concerne les méthodes de self-défense, il semble que le problème est le même pour la femme que pour l'homme. Les raisons de s'intéresser à la self-défense sont valables pour les deux sexes. De légères variantes interviennent néanmoins : sentiment de faiblesse physique, incertitude d'intégration sociale, peur de l'agressivité masculine ainsi que des problèmes psychologiques très variés, suivant chaque cas personnel. Les seuls faits de souhaiter parer à une agression, de garder son sang-froid et dé maîtriser un adversaire masculin, incitent la femme peu sûre d'elle, à pratiquer la self-défense. .
Mais lorsqu'on étudie un tant soit peu les techniques propres à l'auto-défense, une question se pose: ces méthodes sont-elles compatibles' avec la féminité? Les parades, les atemis, les clés, les étranglements et même les projections, conviennent-elles au corps et à la psychologie féminine?
Sans hésitation, on peut affirmer que la self-défense élémentaire est à proscrire dans un enseignement destiné aux jeunes' filles et aux femmes. La résistance physique et la puissance musculaire d'une part, la tension de l'esprit et la dépense nerveuse d'autrepart, leur interdisent un entraînement aussi brutal.
Par contre, la self-défense supérieure étudiée progressivement, par exemple au travers du seyroku et du ju-no-kata, ne peuvent être que bénéfiques. .
Cet entraînement est à la fois une excellente gymnastique, assouplissant et fortifiant le corps et une éducation physique parfaite des réflexes de combat. L'étudiante veillera toutefois à ne pas s'entraîner au début avec des partenaires masculins. Plus tard, il lui sera au contraire tout indiqué de combattre avec des adversaires masculins, mais ceux-ci seront soigneusement sélectionnés par le professeur. Ils devront en effet, avoir une excellente compréhension de la psychologie féminine, des possibilités physiques et nerveuses de la femme. Ils devront, en outre, posséder un solide bagage technique et une maîtrise suffisante pour se comporter t. l'égard de leur partenaire féminine avec simplicité et naturel.
Il tombe sous le sens qu'un adversaire brutal ne fera qu'effrayer sa partenaire sans pour autant l'aguerrir. De même le timide qui, pensant manipuler un objet fragile, n'ose combattre normalement avec sa partenaire, ne pourra jamais aider celle-ci à progresser. Il va sans dire que la manière la plus appropriée de s'initier aux techniques de combat, est pour la femme la pratique du judo.
Les lectrices liront avec intérêt le chapitre qui leur est consacré.
Quant à la self-défense intégrale, elle ne peut être, pour une femme, que l'aboutissement d'un sérieux entraînement en judo. Elle ne l'atteindra qu'au-delà de la ceinture noire.
Quel que soit "entraînement envisagé, la femme peut accroître considérablement ses chances de réussite, en se concentrant sur un point capital: sa respiration.
Il est notoire que la femme a un rythme respiratoire .plus rapide et moins ample que celui de l'homme. Sa capacité thoracique est moindre également. Or, la respiration est en étroite relation avec la maîtrise mentale. C'est une constatation très ancienne, faite déjà par les Yogins de l'Inde et aujourd'hui démontrée par les physio-logistes. .
En self-défense, comme en judo, la maîtrise de soi est nécessaire pour atteindre à une efficacité valable. Le calme de l'esprit, la concentration, la promptitude des réflexes seront acquis d'une manière plus sûre, plus rapide, en pratiquant une respiration profonde et rythmique.
Un excellent moyen de pratiquer cette respiration est celui enseigné dans les premiers exercices du yoga. Le principe en est très simple; il s'agit de décomposer l'acte respiratoire en quatre phases : inspiration, arrêt, expiration, arrêt. Le premier et le troisième temps sont de longueur égale; les deux autres, de la moitié de la longueur des précédents. Je ne saurais trop recommander aux lectrices de ne s'entraîner à ces exercices spéciaux que sous la surveillance d'un spécialiste.
J'ajouterai un mot sur l'entraînement des enfants. La self-défense est à proscrire aux plus jeunes. Elle pourra être enseignée sous forme de katas aux adolescents, s'ils en manifestent le désir. Mais l'étude des atemis doit rester l'apanage des adultes.